J'ai commencé à "reconditionner" des packs de batteries LiIon par hasard, on m'avait refourgué un appareil qu'on m'a finalement donné parce qu'il était cramé et que je ne pouvais pas le réparer. Mais la batterie était encore "utilisable", même si elle avait été un peu "secouée". La jeter était hors de question, d'une part parce que ça ne se met pas à la poubelle et surtout, il y avait probablement encore des choses à faire avec ...
Depuis cet épisode, qui m'a incité à les connaitre et les recharger, je me suis procuré des éléments LiIon de plusieurs types et ai pu examiner les différentes technologies de circuits de protection. En effet, ces circuits font partie intégrante des packs vendus dans le public, alors que les autres chimies (NiCd, NiMH, Pb) sont couramment livrées "nues" (même si les risques sont les mêmes).
Cette intégration, que dis-je, cette fusion, a dû se produire au tout début de l'apparition des éléments LiIon dans le grand public. Par exemple, j'ai des vieux éléments Sony sans aucune protection autre que mécanique. Quelques accidents et légendes urbaines ont mis rapidement fin à cette pratique mais les circuits de protection n'ont pas donné qu'une augmentation du prix : les mauvaises manipulations (ça arrive forcément) sont beaucoup moins risquées. Il n'y a (théoriquement) pas d'explosion possible si un pauvre gusse veut recharger son pack LiIon avec son chargeur pour NiCd (ce qui est la pire des choses).
Enfin, c'est en général, hein, parce qu'en pratique, c'est une autre histoire. On ne peut pas éviter de détérioration quand la batterie est exposée à la chaleur ou tombe dans la mer. Mais il y a aussi parfois des économies de quelques centimes qui peuvent faire la différence : regardez attentivement la photo ci-dessous !
Si vous trouvez que le circuit du bas laisse à désirer, vous avez plus d'un gramme de jugeotte :-) L'économie a un prix, le circuit coûte moins cher puisque la plupart des composants ne sont pas implantés. En plus, les autres circuits sont soudés entièrement à la main, probablement en Chine, ce qui fait une économie supplémentaire en main d'oeuvre. En contrepartie, si vous laissez votre camescope allumé, ne vous étonnez pas qu'il défonce la batterie. Priez pour que l'appareil (le camescope ici) ait une détection de tension basse et un circuit de recharge décent.
Le fusible et la sonde thermique servent quand il est déjà trop tard, donc "c'est déjà ça" mais c'est trop tard quand même et ça ne limite pas la casse. Le fusible va claquer si un courant trop fort circule, mais c'est irréversible et la condition de court-circuit n'est pas éliminée. Cela peut aider en cas de court-circuit ou de surcharge, mais n'empêche pas la décharge profonde ou les déséquilibres.
J'ai même trouvé des packs sans aucune protection, sauf peut-être un fusible, mais je n'en suis même pas sûr car je n'ai pas démonté le pack. F34R !!!
Heureusement, depuis que les téléphones cellulaires sont passées au LiIon, les protections sont assez complètes. Voici quelques exemples de packs achetés d'occasion :
La sophistication est encore plus grande et complète pour les ordinateurs portables, où il y a un tout petit peu plus de place pour mettre des gros interrupeurs MOSFET et plusieurs circuits intégrés pouvant communiquer avec le système d'exploitation. Les courants et les capacités sont quand même beaucoup plus importants.
Nous avons vu comment étaient conçus (extérieurement) les circuits de protection "grand public". Mais quand il y a des circuits intégrés, le fonctionnement et les protections ne sont pas apparents. Alors penchons-nous sur le datasheet d'un circuit, par exemple le UCC3911 vendu par Texas Instruments.
Sa documentation originale est mirorée ici. Sa fonction est de laisser passer le courant de charge et de décharge d'un couple d'éléments en évitant la surcharge, la décharge profonde et les courts-circuits. Les autres conditions sont moins claires.
Une commutation s'effectue en interne et supporte 3A, ce qui évite d'avoir recours à un (ou deux) MOSFET externe. Donc si le circuit imprimé d'une protection ne comporte pas de MOSFET identifiable (souvent en CMS), c'est que la commutation est probablement intégrée. En l'absence de la documentation des circuits, on ne peut pas savoir quel puce commute le courant, quelle puce sert de sonde de courant, ou simplement mesure la tension, à moins que les courants soient importants (comme sur un portable, mais pas les téléphones) et les pistes sont plus grosses pour laisser passer le courant.
Une remarque importante est que ce circuit commute la masse, et non la borne positive, ce qui peut rendre la conception de certains systèmes délicats. De plus, lorsque la batterie est totalement désactivée, le circuit consomme 4µA. Cela peut avoir une influence variable selon les situations. Vu le courant qu'il supporte (3A), l'UCC3911 semble conçu pour gérer de gros packs, dont l'autodécharge est relative faible.
Parmi les éléments intéressants, l'avant-dernière page (nr.9) donne la "machine d'états" de la puce, et montre comment elle réagit quand elle détecte un déséquilibre grave. La petite boule du bas montre qu'il n'y a aucune transition possible hors de cet état, une fois qu'il est atteint.
Dans les cas extrêmes, avec des packs "opaques", le seul moyen de diagnostiquer l'état réel d'une batterie et éventuellement de la "ressuciter", est d'ouvrir le pack et de se connecter directement aux éléments. Souvent, on ne peut pas savoir si tous les signaux sont disponibles et où, et le point commun d'une paire d'élément n'est pas accessible de l'extérieur en général.
Je ne connais pas d'électronique de protection qui entretienne l'équilibre des éléments pour éviter qu'ils deviennent tous inutilisables : le pack est désactivé entièrement sans possibilité de remédier à la condition d'erreur. Cela explique une partie des photos d'"autopsies" de packs de ce site.
En pratique, la plupart des packs sont bien équilibrés et le restent. Une fois qu'un léger déséquilibre apparait, il s'amplifie au fur et à mesure des cycles d'utilisation et peut conduire à anéantir l'élément le plus faible. Normalement, la capacité de la batterie diminue notablement avant que cela ne se produise et l'électronique de protection (si présente) aide à réduire les dommages en empêchant d'autres cycles.
Mais la durée de vie des packs serait plus longue si des techniques d'entretien et d'équilibrage actif étaient en place, ce que je n'ai pas encore vu.
(à suivre)
Un autre document très intéressant sur une protection très simple contre les inversions
de polarité est disponible chez MAXIM :
" MOSFET Driver Is Reverse-Battery Protected" (PDF miroré ici)
Cela montre d'une part comment utiliser un MOSFET, sans autre composant, pour
éviter d'endommager des circuits en aval, et d'autre part comment une paire de MOSFET
sert à couper ou connecter le courant de la batterie.
Le MAX1614 (voir sa fiche technique chez MAXIM) est en fait un circuit très simple, avec peu d'électronique, et sa pompe de charge n'utilise même pas de capacité "flottante" comme sur un ICL7660, MAX232, ou même le MAX622/MAX1822. La consommation du circuit intégré de contrôle, cependant, est une autre histoire, et son impact sur la durée de vie du pack n'est pas précisée. En effet, si le pack est hors de l'appareil, l'électronique ne doit pas être alimentée, encore moins par la batterie elle-même.
(à suivre)
D'autres circuits existent, du plus simple au plus complexe, chez une multitude de fabricants. J'espère que ces explications vous permettent maintenant de mieux comprendre, examiner, utiliser, diagnostiquer et éventuellement réparer des packs d'éléments LiIon.